Comme Renad et Talia, jeunes palestinien et juive, nous aspirons à un monde libre de toute haine, fondé sur des valeurs de liberté, de justice et d’égalité de droits pour toutes et tous. Ensemble, nous revendiquons notre espace démocratique contre celles et ceux qui tentent de nous réduire au silence, pour défendre la justice et la redevabilité des gouvernants.
Je m’appelle Renad et je suis Palestinien de cette génération qu’on appelle « génération Y ». Je souhaite être libre et jouir de mes droits fondamentaux.
Pourtant, quand je défends ces simples valeurs fondamentales, on m’accuse d’antisémitisme.
Aucune tolérance ne doit être accordée aux discours haineux ou aux fanatismes, qu’ils soient adressés contre les juifs, les musulmans, les femmes ou qui que ce soit. Nous devons nous opposer à toute forme de propos haineux et à celles et ceux qui les utilisent pour susciter la peur, le racisme, la violence ou la suprématie.
Nous devons également nous élever contre celles et ceux qui instrumentalisent la lutte contre la haine pour nier la réalité de ma vie sous occupation israélienne, dans un système de contrôle et d’oppression.
Cette réalité n’est pas abstraite mais bien omniprésente dans mon quotidien : de l’expropriation des terres de ma famille, au rationnement de l’eau, au franchissement quotidien de barrages militaires, à l’impossibilité de quitter la Palestine sans permis des autorités israéliennes, et l’insécurité quotidienne de ne pas savoir si l’on va pouvoir rentrer chez soi.
Je suis diffamé et réduit au silence simplement pour avoir dit au monde que je voulais être libre et vivre dans la dignité en pleine possession de mes droits. L’espace qui nous entoure se réduit chaque jour et nous étouffe.
Aujourd’hui, c’est non seulement notre espace physique mais aussi notre espace d’expression qui est sciemment bloqué, et cela dans le monde entier, pour nous empêcher de défendre notre liberté et nos droits : cela va des campagnes de diffamation qui alimentent la peur et la haine, aux initiatives politiques qui en toute légalité restreignent à la fois la liberté d’expression et le droit démocratique de demander des comptes aux auteurs d’injustices.
Les gouvernements du monde entier n’œuvrent pas suffisamment pour protéger cet espace et participent à la polarisation des discours.
Il est temps de recouvrer cet espace citoyen, de défendre nos valeurs et nos droits en partage, de défier celles et ceux qui propagent la haine et ceux qui manipulent les combats contre la haine.
Je m’appelle Talia et je suis Juive, de la génération « Y ». J’ai été traitée de traître et de juive qui a la haine de soi pour avoir voulu défendre les valeurs de liberté, d’égalité, de justice et des droits pour toutes et tous.
La liberté et les droits humains des Palestinien.ne.s sont importants pour moi parce que je tiens à la dignité humaine pour toutes et tous. Je me désole qu’au nom de la sécurité des Juifs, l’État d’Israël traite les Palestiniens comme un peuple de seconde zone, avec moins de droits et peu de liberté. Ma communauté et mes valeurs juives m’inspirent et me motivent pour me battre pour la véritable sécurité, celle qui passe par la solidarité.
J’en ai assez que mon identité et mon histoire soient utilisées contre l’humanité des Palestinien.ne.s.
Je ne me tairai pas et je continuerai de faire entendre ma voix pour défendre la justice, l’égalité et la dignité pour toutes et tous.
Comme Renad et Talia, nous vous demandons de signer cet engagement afin de montrer au monde que :
Nous ne serons pas réduits au silence. Nous allons défendre la liberté démocratique de nous exprimer et notre droit à demander des comptes aux auteurs d’injustices.
Rejoignez-nous pour construire un avenir fondé sur cette approche indivisible et universelle des droits et mettre ainsi fin à toute forme de haine et de discrimination.
En signant cette pétition, je m’engage à :
Défendre les valeurs de liberté, de justice et d’égalité, et les droits humains pour toutes et tous ;
Combattre l’antisémitisme, l’islamophobie et toutes les formes de haine, de discrimination et de racisme ;
Soutenir la liberté et les droits des Palestinien.ne.s et défier les systèmes qui les oppriment ;
Défendre le droit démocratique de critiquer librement celles et ceux qui commettent des injustices et de les tenir pour responsables, qui qu’ils ou elles soient.
C’est en donnant à nos voix une portée collective que nous serons entendus. C’est pourquoi chaque signature compte.
Ensemble, nous pouvons et nous devons récupérer et protéger notre espace démocratique. Tous nos gouvernements et nos représentants politiques doivent nous entendre. Ils sont responsables de la protection de cet espace et de la promotion de ces valeurs et de ces droits.
C’est pourquoi nous les appelons à soutenir cet engagement et à s’opposer à toute mesure juridique ou politique qui instrumentalise les discours de haine et porte atteinte à ces valeurs et à ces droits.
Le «modèle de coexistence» est obsolète et trompeur.Au lieu de cela, une militante palestinienne et un militant israélien parlent d’éliminer ensemble les systèmes d’oppression en partant de la base
Alors que la dépossession de la Palestine entre dans sa huitième décennie et l’occupation du peuple palestinien par Israël dans sa sixième, il est temps de changer définitivement les termes de la conversation.
De nombreux camps de vacances et ligues de jeunes encouragent un dialogue de coexistence entre Israël et la Palestine. Ce modèle est également privilégié par la diplomatie américaine concernant le conflit post-Oslo. L’hypothèse selon laquelle la coexistence peut résoudre des problèmes profondément enracinés est cependant trompeuse. Cela crée une fausse image d’égalité entre les Palestiniens et les Israéliens et minimise le déséquilibre systémique de pouvoir entre un État occupant et un peuple occupé.
Sachant cela, il est important de définir une approche alternative qui permette véritablement aux Palestiniens et aux Israéliens de s’unir en rejettant l’impérialisme et la discrimination sous toutes ses formes dans l’intérêt des deux peuples. Nous pensons que notre histoire, celle d’une profonde solidarité entre un Israélien et une Palestinienne qui rejettent également l’État militaire et la ségrégation ethnique d’Israël, peut servir d’exemple pour une nouvelle approche, celle de la co-résistance.
Omri: J’ai été élevé dans une famille juive progressiste à Jaffa. J’ai eu le privilège de grandir dans un quartier partagé par des musulmans, des chrétiens et des juifs, ce qui est malheureusement une expérience rare. Malgré la prétention d’Israël à être un pays multiculturel, la ségrégation ethnique domine notre société.
Adolescent pendant la deuxième Intifada, je suis devenu politiquement actif en réaction à l’apathie que j’ai constatée chez mes propres camarades de classe, indifférents à la souffrance des Palestiniens opprimés chaque jour par les forces de “défense” israéliennes, mais aussi aux nombreux Israéliens poussés dans la pauvreté par les politiques néolibérales. Je savais que je devais prendre position contre un système qui traitait les Palestiniens, ainsi que de nombreux juifs privés de leurs droits, avec une telle dureté.
En 2005, j’étais l’un des organisateurs d’une lettre signée par 250 lycéens déclarant notre refus de servir dans l’armée israélienne. Bien qu’emprisonné pour cette décision, j’ai continué à me battre pour la paix et la justice dans ma communauté et mon pays.
Je ne pouvais cependant pas faire cela tout seul : le fait d’être aux côtés de Palestiniens qui luttaient pour la libération m’a donné le courage de prendre la parole. Ce sont les personnes qui ont le plus influencé mon activisme, ma vision du monde et mon identité. J’ai trouvé une cause commune avec des amis arabes dans la Ligue de la jeunesse communiste d’Israël, luttant ensemble pour démanteler les systèmes dont je commençais à réaliser qu’ils ne les opprimaient eux seulement, mais aussi moi-même et ma communauté. La première fois que je me suis senti fier d’être juif israélien, c’est lorsque j’ai marché aux côtés de Palestiniens qui protestaient contre le mur d’apartheid dans le village de Bil’in en Cisjordanie.
Renad: Je suis une Américaine d’origine palestinienne, née et élevée à Ramallah. Ayant grandi en Cisjordanie, j’étais confiné à 251 milles carrés parsemés de points de contrôle militaires et d’un mur imposant truffé de tireurs d’élite. Essayer de grandir, physiquement et mentalement, tout en étant prise au piège dans une prison à ciel ouvert était épuisant. En tant que Palestiniens, nous sommes quotidiennement soumis à la violence militaire et institutionnelle, mais fréquenter une école internationale me donnait des privilèges uniques.
Après avoir obtenu mon diplôme d’études secondaires, j’ai finalement réussi à franchir les barrières de ségrégation et d’occupation israéliennes pour aller à l’université aux États-Unis. Là-bas, voyageant d’un État à l’autre avec aisance, j’ai commencé à comprendre pleinement ce que signifiait être opprimé et marginalisé par un pays qui pratique la suprématie juive blanche. Il m’a fallu quitter ma maison, ma famille et mes amis pour enfin comprendre à quel point nous, les Palestiniens, en sommes venus à considérer l’occupation comme si elle faisait partie de la vie normale.
Alors qu’en Palestine, mon activisme était strictement limité à la participation à des manifestations, le fait de m’engager dans le plaidoyer pour la Palestine aux États-Unis m’a permis de découvrir le rôle que je voulais jouer pour résister à l’occupation israélienne. Au fil du temps, j’ai commencé à en apprendre davantage sur la solidarité et les actions collectives susceptibles de contribuer à la libération de mon peuple. J’ai appris cela aux côtés de militants solides en quête de justice pour toutes les communautés marginalisées.
J’ai rencontré pour la première fois Omri lors d’une semaine de sensibilisation sur la Palestine à Washington, DC. Après des années d’interaction avec des Israéliens en tant que soldats et occupants qui nous contrôlaient, les traiter comme des ennemis est devenu très ordinaire. C’est le premier Israélien que j’ai rencontré qui avait rejeté le service militaire, obligatoire pour les Juifs et les Druzes en Israël. J’ai soudain découvert que de l’autre côté du mur d’apartheid de 25 pieds qui sépare nos communautés, qui ne vivent qu’à 90 kilomètres de distance, quelqu’un envisageait tout comme moi de démanteler les systèmes de violence israéliens et de dépendance à l’impérialisme occidental.
Travailler aux côtés d’Israéliens pro-palestiniens comme Omri et de Juifs américains m’a permis de découvrir une forme de solidarité que je ne connaissais pas. J’ai maintenant d’innombrables relations, amis et liens avec des Juifs américains, qui rejettent les actions d’Israël et voient des alliés naturels chez les Palestiniens comme moi.
Pendant des décennies, nous, les Palestiniens, avons été invités à la table pour des séances de photos et des dîners – jamais pour un accord sur la récupération de terres, la dignité ou l’autodétermination. Le «processus de paix» soutenu par les États-Unis et qui se poursuit depuis Oslo n’a fait qu’empirer les choses pour les Palestiniens, en particulier les réfugiés palestiniens. Maintes et maintes fois, de l’argent est injecté dans les poches de nos «sauveurs» sans que rien ne prouve que leur travail améliore la vie des Palestiniens.
C’est la raison pour laquelle le «statu quo» n’est plus à l’ordre du jour : le nettoyage de la conscience israélienne ne devrait plus faire partie de l’ordre du jour. Pour lutter contre toutes les formes de racisme dans nos communautés, nous devons viser un changement systématique, pas seulement le dialogue. La co-résistance exige un engagement à mettre fin à l’occupation, la réalisation du droit de retour, ainsi que le plaidoyer constant pour l’égalité des droits pour tous. Cela permet un dialogue constructif consacré à la libération collective. Nous ne perdons pas notre temps dans un dialogue émotionnel qui vide la paix de sa définition. Au lieu de cela, nous nous concentrons sur l’élimination des systèmes d’oppression par le bas, principalement l’occupation des Palestiniens par Israël et l’État d’apartheid en quoi il s’est transformé.
Omri: Contrairement à de nombreux projets bien intentionnés qui promeuvent la coexistence entre Israéliens et Palestiniens, le type de co-résistance pour lequel Renad et moi-même plaidons repose sur une lutte commune contre des institutions et des systèmes de pouvoir basés sur la violence. Il se distingue également de la politique philanthropique des Juifs progressistes qui aiment exprimer une solidarité unilatérale avec les Palestiniens, qui reproduit involontairement le trope qui dépeint les gens comme des sauveurs blancs ou des victimes noires / brunes.
La co-résistance nous oblige tous les deux à reconnaître que notre libération individuelle est indissociable de celle des autres. Alors que les Palestiniens supportent de manière écrasante le poids de la règle oppressive actuellement en place, tout le monde est blessé. Étant l’un des plus gros dépensiers militaires par habitant dans le monde, Israël se trouve dans un état de guerre et de peur constant, avant même de prendre en compte les 38 milliards de dollars que les États-Unis dépensent pour l’armée israélienne par l’intermédiaire de sociétés privées d’armement. Dans le même temps, plus d’un tiers des enfants israéliens et 70{49c69444adfa0b057aa5591c65ae37ccec5e603da12fa952fa85b5f3d8016590} des enfants palestiniens vivent sous le seuil de pauvreté.
La co-résistance reconnaît que même en tant que citoyen de l’État occupant, mon meilleur espoir de transformer mon pays en un endroit vraiment meilleur pour moi-même et mon peuple est de se battre aux côtés des Palestiniens résistant à l’oppression de mon État. Cette stratégie me permet de démontrer au public israélien que nos véritables ennemis ne sont pas les Palestiniens, mais le gouvernement israélien et la classe dirigeante aisée qui perpétuent un système de division et d’oppression. En tant qu’Israélien, être solidaire de la lutte palestinienne pour la justice et l’égalité des droits est le moyen le plus efficace de parvenir à la paix et à une société égalitaire, démocratique et juste pour tous les habitants de ce pays.
Nous, Renad et Omri, rejetons l’idée selon laquelle l’autodétermination du peuple juif se fasse aux dépens des Palestiniens, une idée récemment défendue par la loi sur l’État-nation juif. Le respect des droits des Palestiniens ne doit pas être perçu comme une menace pour les Israéliens, mais comme une condition nécessaire à un avenir meilleur pour nos deux peuples. C’est donc un objectif pour lequel nous devons nous battre ensemble. Nous devons nous organiser sur un pied d’égalité, aux côtés des autres peuples du Moyen-Orient.
Renad Uri est récemment diplômée de l’Université George Washington.Elle est spécialisée dans la politique du Moyen-Orient, en particulier en ce qui concerne la Palestine et l’aide fournie à Israël par les USA.En 2016, Renad est devenue membre actif de Students for Justice in Palestine et du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions aux États-Unis.
Omri Evron est un militant israélien pour la paix et la justice sociale né en 1987 à Jaffa.En 2006, il a été interné dans une prison militaire israélienne en tant qu’objecteur de conscience protestant contre l’occupation du peuple palestinien.Omri est un membre actif du Parti communiste d’Israël et du Front démocratique pour la paix et l’égalité («Aljabha / Hadash»).Il prépare actuellement son doctorat au département Politique et gouvernance de l’Université Ben Gurion.