Ce matin départ du groupe vers Ramallah, nous nous rendons à la conférence internationale intitulée : “Food sovereignty… Colony and frontiers”, réunion à l’initiative de trois organisations : “Via Campesina”, “Social and Economic Policies Monitor” et “UAWC (Union of agricultural Work Committees”.
“Via Campesina” regroupe 182 organisations syndicales et associations paysannes de 81 pays, ce qui représente environ 200 millions de paysans(es) réunis autour de la défense de la culture paysanne de solidarité, de la souveraineté alimentaire, de la défense des peuples autochtones et de l’égalité des sexes.
C’est un mouvement qui se revendique autonome, indépendant des pouvoirs publics, contre le capitalisme international, promoteur du lien entre l’homme et la terre (notion de mémoire et de patrimoine) et qui souhaite “porter la voix des sans voix”.
Muni de nos oreillettes nous permettant ( mas o menos ) une traduction en Anglais ou Espagnol nous avons pu entendre (ainsi que des Gazaouis présents en visio-conférence) l’allocution d’ouverture de la conférence. Des représentants de chacune des associations introduisent le propos du congrès en commençant par rendre hommage aux martyrs et aux prisonniers “qui meurent et souffrent la torture pour la cause” ainsi qu’aux agriculteurs qui travaillent et luttent pour la préservation de leurs terres. Ce rassemblement est l’opportunité “d’approfondir nos consciences libertaires”et de réaffirmer que, malgré les problèmes sociaux et politiques, les villages et les peuples ont le droit et le pouvoir de résister à l’hégémonie capitaliste mondiale en Palestine et ailleurs.
La souveraineté alimentaire est selon Via Campesina un levier de résistance contre l’oppression et/ou l’occupation ainsi qu’un moyen d’émancipation et de justice sociale et économique.
Nous assistons à la première session de discussions où plusieurs intervenants d’organisations internationales évoquent :
- La nécessité de changement de système créé par et pour une minorité de personnes qui privatisent et conservent pour eux-même les richesses souvent produites par le labeur d’autres. Système créateur de pauvreté comme ici en Palestine par la destruction de la capacité des villages à produire. (expulsions, destructions des infrastructures et plantations, vols des terres)
- Le problème de la dépendance économique alimentaire et technologique au régime oppresseur (inondation du marché par les produits Israéliens à prix cassés) et de la nécessité d’en sortir par la création d’organisations collectives et indépendante à taille humaine (type coopératives, regroupements ayant fait leurs preuves pour assurer l’autosuffisance dans un système colonial).
- La différence entre “souveraineté alimentaire et “sécurité alimentaire” : si cette dernière prévoit un accès équitable à l’alimentation, elle ne garantit pas le contrôle de la distribution aux producteurs eux-même.
- De l’intérêt du commerce en circuit court (économie populaire) et de la redéfinition et/ou de la création (recréation) du lien direct entre consommateurs et producteurs “le consommateur se définissant par ce dont il a besoin” (qualité//quantité).
- De l’importance de “l’éducation” alimentaire et au rapport à la terre et de l’indispensable formation technique (agro-écologie, nouvelles technologies…)
Dénonçant la spoliation de la terre et l’usurpation de l’histoire et la mémoire palestinienne, l’économie capitaliste et le projet colonial en Palestine, la Via Campesina revendique le temps de l’action concrète, pacifiste, dans “cette marche vers la lumière et la résistance”.
… sur le chemin retour, nous faisons une halte au musée rendant hommage à Mahmoud Darwich (1941-2008), célèbre écrivain poète palestinien qui n’a cessé d’évoquer le lien avec sa terre et ses racines. “je rends le ciel à sa mère quand il pleure pour elle et moi je pleure pour que le nuage me reconnaisse à son retour. Pour rompre les règles, j’ai appris tous les mots appropriés à la justice de sang. J’ai tout appris de la langue, je l’ai démêlée pour former un seul mot : patrie… “.